Hacker : un triste manque d'ambition


Michael Mann, le réalisateur de Hacker, a une filmographie inégale. Collateral était un chef d’œuvre noir et mélancolique, qui accordait à Tom Cruise un de ses plus beaux rôles, et donnait ses lettres de noblesse au cinéma numérique. Heat et Public Enemies étaient bons également. Il faut néanmoins concéder, qu’à part une réplique amusante sur Jackson Pollock, Miami Vice était indéniablement mauvais…
Sur le sujet qu’il avait choisit cette fois de traiter, la cybercriminalité, un thème très actuel, on avait de bonnes raisons de lui faire confiance. Mais force est de constater que Hacker ressemble davantage au dernier film cité qu’aux deux premiers et, pour un certain nombre de motifs, on est malheureusement très vite déçu.

La première grosse lacune du film est la manière dont il sous-exploite absolument les possibilités offertes par le sujet du pouvoir informatique. Ainsi, en ne s’intéressant finalement qu’en surface aux dangers et aux failles des nouvelles technologies, et en ne nous présentant le « hackage » que comme quelque chose de purement accessoire, Michael Mann échoue là ou un film comme Die Hard 4 , ou même un jeu vidéo comme Watch Dogs, réussissaient.

Dès la bande annonce, nous sommes prévenus, Hacker évacue toute dimension politique. On peut le regretter traitant un thème qui, par ceux qu’il implique (virtualisation totale des données bancaires, la surveillance de masse de la NSA qui agit hors-droit et hors-sol, l’enjeu des cyber-guerres, le cyber-militantisme et la cyber-résistance…) l’est éminemment. La qualité du scénario s’en ressent : le « méchant » sans cause est creux, sans charisme et sans mystère, bref…mauvais. Or comme le disait Alfred Hitchcock « plus réussi est le méchant, plus réussi sera le film ».

S’agissant des personnages, machos comme tout, ils manquent eux aussi cruellement de profondeur. On ne croit ainsi pas du tout à l’histoire d’amour qui naît entre deux des personnages et on s’en désintéresse assez largement. Le choix des acteurs avec Chris Hemsworth et son look d’égérie de magazine de surfeurs (qui rappellerait presque le personnage de Thor dans Kaboom…) n’arrange rien au problème.


Reste la très bonne maîtrise des scènes d’actions auxquelles Michael Mann nous a habitué (scène du bar). Toutefois si le procès en réalisme contre un film (à part s’il le revendique) est malhonnête, ce n’est pas le cas de celui en cohérence. Et il est tout de même difficile de ne pas trouver franchement grotesque la façon dont le héros hacke un des programmes les mieux gardés de la NSA , ou un peu ridicule la manière dont deux personnages se joignent à une fusillade contre un groupe de mercenaires dotés d’armes de guerre en se lançant contre eux à découvert armés de pistolets (et se font donc exécuter ce qui n’est pas sans renforcer l’absurdité de la scène).

 

Si Hacker dispose des qualités de réalisation habituelles de Michael Mann, il déçoit néanmoins par son manque cruel d’ambitions, que ce soit dans la manière dont il traite son sujet ou par le manque d’épaisseur de ses personnages. 

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