Whiplash : capitalisme et sadomasochisme 


Attention SPOILERS

 

Whiplash c’est avant tout le portrait de deux personnages.

L’un, petit tyran qui abuse de son autorité pour humilier, rabaisser, au prétexte qu’il est le seul moyen de se dépasser et de progresser : méthodes moyenâgeuses bien connues, malheureusement, de certaines unités militaires et d’écoles privées à la pédagogie d’un autre temps. Par son jeu physique, sa grossièreté extrême, son crâne chauve luisant, sa violence sadique et ses insultes sur le physique, le personnage joué par J.K. Simmons n’est d’ailleurs pas sans rappeler un autre tortionnaire célèbre du cinéma : le Sergeant Hartman (Lee Ermey) de Full Metal Jacket.

L’autre un jeune arriviste qui accepte l’injustice du système tant qu’il pourra en bénéficier à l’arrivée.

Un des points intéressants du film est qu’il ne nous enferme pas dans la dichotomie classique d’un long métrage sur un rapport de domination psychologique avec un bourreau et une victime clairement identifiés. En effet, lorsque le jeune homme, Andrew Neiman (Miles Teller) se rebelle ce n’est que pour protester contre les injustices dont il a été victime, jamais contre celles qui ont touché ses camarades et qui auraient du l’alerter sur son sort futur. Pire que cela, la jouissance puante qu’il ressent à prendre la place d’un ses collègues, participant par là à rendre son humiliation non plus bilatérale entre le professeur et lui mais bien collective, nous est montrée : la compétition érigée en une valeur créatrice de progrès fait en réalité émerger les instincts les plus vils de l’être.
Nous y sommes : à bien des égards, Whiplash apparaît comme une micro-allégorie du capitalisme.

 

Il est alors un film sur l’aliénation, sur la violence symbolique qui entraîne l’adhésion des dominés aux valeurs du système dont ils sont les victimes, les poussant à la servitude volontaire. Lors de la scène de la discussion dans le jazz club, Andrew finit par croire à la bienfaisance de logique barbare du maître Fletcher : c’est le syndrome de Stockholm, l’empathie développée par les otages envers leurs geôliers. 

Une autre lecture du film pourrait être que Whiplash est un film sur une tension homosexuelle refoulée et sadomasochiste entre deux hommes. En témoigne la manière curieuse dont Terrence finit par remplacer totalement la ravissante copine (Melissa Benoist) d’Andrew,et le coeur soudainement brisé du professeur bodybuildé Fetcher lorsqu’il apprend le décès d’un de ses anciens poulains. 

Ou alors, et c’est aussi tout à fait possible, la trame (faussement) simpliste n’est qu’un prétexte pour une bande son tout à fait réjouissante, une tentative pleinement réussie de filmer la musique, l’instrument, et la passion du batteur.

Le film, en plus des performances d’acteurs et en particulier celle de J.K Simmons, sorte de John Malkovich viril et surexcité, vaux également pour sa fin toute ambiguë : une vengeance qui devient une entente entre les deux monstres. La morale est douteuse, mais une chose est sure, l’élève est autant un salopard que le maître. 

Anatole 

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